« Dans un projet agrivoltaïque, le solaire ne fait pas tout ! »

Le 14 novembre 2023

« Le point d’entrée d’un projet agrivoltaïque, ce n’est pas l’énergie solaire, c’est le projet agricole » a déclaré Sylvain Mouche, responsable innovation et agriculture du spécialiste de l’agrivoltaïsme, GLHD, pendant la traditionnelle « Conférence annuelle agrivoltaïque » organisée le 14 novembre à Bordeaux par l’Institut national de l’énergie solaire (INES).

La conférence avait pour titre « Produire mieux grâce à l’agrivoltaïsme ». Invité à s’exprimer, Sylvain Mouche a tenu à rappeler que « le solaire est une toute petite façade d’un projet agrivoltaïque ». Extraits :

D’abord diagnostiquer les problématiques

« Un système agrivoltaïque doit amener un service à la culture ou répondre à une contrainte. C’est pourquoi nous prenons toujours le temps de réaliser un diagnostic complet des parcelles et des exploitations. L’objectif est d’identifier les problématiques auxquelles il va falloir répondre de manière pertinente, ce que va pouvoir apporter l’agrivoltaïsme en termes de bénéfices. Nous n’avons pas une technologie préférée ou sur étagère. C’est le projet agricole qui commande à la technique de s’adapter. »

 Privilégier le « sur mesure »

« Dans cette logique, nous prenons le temps de bien approfondir la réflexion sur le projet agricole. Notre retour d’expérience d’une trentaine de projets en France, aussi originaux que diversifiés (plantes aromatiques, arbres truffiers, céréales, légumes etc.) est précieux. À chaque projet correspond un design adapté avec son espacement entre les rangées et défini sur mesure avec les agriculteurs. »

Promouvoir la R/D

« Pour le projet de Lagravette dans le Lot-et-Garonne, qui a obtenu ses permis au mois de juin 2023, nous avons privilégié un espacement de 9 m de poteau à poteau étudié pour faire du légume sec, en particulier du haricot. Les cultures envisagées ont besoin d’eau et de températures raisonnables, les infrastructures permettront de répondre à ces enjeux, de réduire l’évapotranspiration et de maîtriser les besoins en irrigation. L’envergure du projet stimule la recherche et développement sur le machinisme. »

Voir plus loin que la technique

« Pour un autre projet dans l’Indre, l’espacement entre des structures fixes atteint les 12 m de poteau à poteau, suffisant pour la mécanisation adaptée aux grandes cultures de céréales prévues par le projet agricole avec une rotation sur 9 ans : blé, épeautre, petit épeautre… Le système agrivoltaïque est conçu pour réduire l’évapotranspiration et augmenter la quantité d’eau disponible pour les cultures. Les structures prennent en compte la possibilité d’une transformation en farine bio directement sur l’exploitation. »

Nourrir les animaux toute l’année

« Pour les projets ovins, nous étudions d’abord la qualité des parcelles. Si les prairies sont très malvenantes, un des objectifs sera de produire plus d’herbes. Nous faisons attention à réserver des parcelles où il n’y pas de pâturage avec des cultures fourragères. L’objectif est de favoriser une alimentation des animaux toute l’année. Les projets que nous accompagnons visent une taille de cheptel de l’ordre de 300 à 700 têtes, il faut donc prévoir toutes les conditions de réussite comme la présence d’une bergerie, être sûr qu’il y a un abattoir à proximité et en bonne santé, s’assurer de la bonne formation du futur éleveur… »

Privilégier une vision d’ensemble

« Au-delà des infrastructures, l’aménagement d’une ferme agrivoltaïque se regarde avec une vision d’ensemble : la place des transformateurs, les tournières, le cheminement des câbles, les matériels agricoles choisis pour cultiver la culture principale et celle définie comme auxiliaire (au plus près des poteaux)… Ce qui suppose d’anticiper les cultures qui seront exportées ou valorisées sur l’exploitation. C’est un travail qui est réalisé en concertation avec les agriculteurs, tout comme celui de réfléchir aux surfaces improductibles qu’il faut rendre utiles. Ça aussi c’est produire mieux. »

Mieux cultiver le potentiel des terres à l’échelle de l’exploitation

« L’agrivoltaïsme, ce n’est pas faire de l’agriculture sur des parcelles impossibles à cultiver. Au contraire, l’agrivoltaïsme doit se faire sur des parcelles où il existe un potentiel à redynamiser. Un bon projet agrivoltaïque doit permettre à l’agriculteur d’exploiter le meilleur du potentiel de ses parcelles concernées et d’investir sur ses autres terres, de changer d’agriculture, d’installer du drainage grâce au revenu complémentaire tiré du solaire. Mis en place sur 10 à 15% de la SAU d’une exploitation, l’agrivoltaïsme peut avoir un impact significatif pour mieux produire sur les 80 à 85 % de la SAU restante. »

Sylvain Mouche sur la scène de la traditionnelle Conférence annuelle agrivoltaïque organisée par l’Institut national de l’énergie solaire.
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